10 compétences mentales dans le Versus Fighting
Yosh !
On a tous vécu un jour une situation où tout bascule. Le fameux « tournant » d’un match. Et ces tournants influencent positivement ou négativement votre rencontre.
Les conséquences de ces aspects psychologiques sont sans appel : plaisir, beau jeu, ragequit, victoire ou défaite, « sortir » du match etc. Dans cet article, on va aborder les compétences psychologiques/mentales qu’un joueur de VS peut acquérir, développer et même modifier en cours de match, afin de mieux aborder son adversaire.
Pour encore mieux appuyer le propos, précisons un point. Toutes ces compétences vous seront utiles, mais particulièrement en situation de tournoi. En effet, notre mental n’est pas du tout le même que lorsque qu’on joue bien au chaud chez nous (ici, pas de ladder anxiety, mais une forme de trac dû à l’enjeu, comme n’importe quel examen ou concours/tournoi de sport).
Le commentateur qui hurle, les gens qui vous regardent derrière l’épaule, la sueur, la chaleur, la pression, la fatigue, l’attente. Tant de facteurs qui peuvent modifier tout votre jeu, votre perception, votre lucidité. Fort heureusement, comme je le disais lors de mon précédent article, rien n’est une fatalité, tout s’apprend, tout s’acquiert, et on va voir quelques idées maintenant.
#1 Résistance à la pression
Une balle de set, rattraper un score, la « peur de gagner ». Autant de facteurs qui augmentent les comportements susceptibles d’exercer une pression sur le joueur. Si avant de prendre la manette/stick vous avez les mains moites, vous êtes craintif ou anxieux au point de ne pas développer pleinement votre jeu, vous avez donc une marge de progression en ce qui concerne la résistance à la pression. Cette caractéristique se nomme la résilience, et désigne la personne qui peut surmonter l’adversité, résister aux pressions.
Premièrement, à chaque round perdu ou gagné, vous avez quelques secondes de répit. Profitez-en pour respirer profondément pour retrouver un certain calme. Fermez les yeux, recentrez-vous.
Deuxièmement, une étape qui se déroule avant un match, c’est bien évidemment le training (on y viendra, on fera un article complet là-dessus). C’est votre meilleur allié, car plus votre entrainement a été poussé, plus vous pouvez transférer ce que vous avez appris/vu en tournoi, ce qui laisse moins de place à l’improvisation (source potentielle de stress supplémentaire).
Retenez qu’il est normal d’avoir le trac avant un match. Tout le monde l’a. Le résilient sera celui qui arrive à déployer son jeu malgré ce trac, à faire avec.
#2 Etat émotionnel
Dans tous les domaines existants, en format de compétition (du concours de couture à Roland Garros), les émotions fluctuent et sont exacerbées. Vous pouvez passer d’une joie intense à une profonde envie de meurtre. Nous connaissons tous une personne qui se dit « entière », particulièrement sensible à ces états-là en format de tournoi, ce qui est profondément humain. La tension accumulée (surtout sur de longs sets) combinée à une erreur peut provoquer un tourbillon de colère, de frustration, de peur qui entraîne des décisions de jeu irrationnelles, voire d’explosion littérale de rage. À peu près tout le monde a une marge de progression intéressante à ce niveau-là, car réussir à rester stoïque et lucide est une compétence extrêmement efficace en tournoi.
Utilisez les phases de non-jeu intelligemment. Pour ce faire, vous devez vous connaitre, savoir de quoi vous avez besoin pour être dans une situation où vous vous sentez à l’aise et en pleine possession de vos moyens. Pour certains, ce sera d’être entouré d’amis, de rigoler, de penser à autre chose, de freeplay en attendant son tour. Pour d’autres, ce sera d’être seul, d’écouter de la musique dans son coin, d’être au calme. Entre chaque tour, profitez-en donc pour vous recentrer et diminuer votre tension des matchs précédents et à venir.
N’hésitez surtout pas également à utiliser votre « break » pendant un match où vous sentez que vous vous emballez. Un break, c’est un temps mort, où vous pouvez souffler (par exemple, retournez en sélection de perso). Dégourdissez vous les mains, fermez les yeux, respirez bien profondément. L’effet est double : vous faites un « reset » de l’état émotionnel des 2 participants (le gagnant qui est chaud se refroidit et redescend de son nuage, le perdant se recentre pour retrouver un état de combattre de manière lucide)
#3 Concentration
« Reste concentré ». « Concentre-toi ». « Focus putain » . On l’entend tout le temps. Mais qu’est-ce que c’est exactement? Dans le VS Fighting, les combats se divisent en rounds, qui ont une durée définie (par exemple – 99sec). Durant cette période, il convient de réussir à utiliser toute l’attention de notre cerveau, et ne pas prêter attention à notre environnement. Je le disais au début, les situations de tournoi sont particulières : énormément de bruit, de chaleur, de monde. Autant de stimuli susceptibles de détourner notre attention du match en cours et susceptibles donc de nous déconcentrer. Pour vous imager la concentration, imaginez une zone sombre éclairée uniquement par un faisceau de lumière. Vous voyez toute la zone, mais plus particulièrement ce faisceau, comme un laser. La déconcentration se fait lorsque vous essayez de voir la zone d’ombre plus clairement.
Énormément de stimuli peuvent vous faire sortir d’un match (la foule, un problème personnel, la fatigue….) et c’est à ce moment qu’un joueur aiguisé aux arts de la concentration peut prendre l’avantage.
Pensez à votre gameplan (le plan de jeu) en début de round, et observez votre adversaire. En faisant cela, vous occupez correctement votre cerveau, qui ne peut pas flancher à ce moment là. Les moments où vous lâchez prise sont lorsque vous commettez une erreur (vous prenez une furie au pif, un jump-in, vous ratez un combo et vous vous faites punir…). Ici, tout le travail est de ne jamais se remémorer la faute commise mais revenir immédiatement sur le « ici et maintenant ». Le passé est passé, c’est maintenant que ça se joue.
Ensuite, je ne le dirai jamais assez, mais la pratique de la méditation est un entrainement pur et simple de la concentration. Comme un muscle, la concentration se travaille, et avec de la régularité et de la pratique, le moment présent est plus facilement ré-atteignable après avoir perdu son focus. Pensez-y (si vous ne savez pas comment démarrer, je mettrai un lien Discord à la fin de cet article, vous pourrez venir en discuter directement avec moi).
#4 Persévérance
Ce n’est pas une compétence directement applicable en tournoi. Néanmoins, une personne persévérante encaissera plus de défaites facilement, tout en apprenant de ses erreurs. Les défaites peuvent enseigner plus que les victoires et la persévérance peut être un formidable carburant pour progresser rapidement. C’est une incroyable qualité que de voir tout le temps le positif même dans l’échec, car cela permet d’apprendre sur tous les plans.
La progression est indépendante de l’issue d’un seul match. Dans votre évolution, retenez que plus vous jouez et apprenez de vos erreurs, plus vous deviendrez fort. Vous pouvez également chercher des sources de persévérance dans des citations positives, votre « sensei » qui vous encourage, votre propre volonté, votre « shonen spirit ». Pour ma part, j’utilise principalement 2 citations, les voici :
Nelson MANDELA : « Je ne perds jamais, soit je gagne soit j’apprends »
« La seule personne à laquelle tu dois te comparer pour être meilleur est celle que tu étais hier » (impossible de retrouver l’auteur)
#5 Motivation
La motivation se définit comme l’ensemble des raisons qui nous conduisent à des actions dans la poursuite de nos objectifs. Ici, pas de recette miracle, car la motivation est très personnelle, subjective. En effet, vous seul pouvez savoir quels buts vous souhaitez atteindre, et pourquoi. Il est donc essentiel d’avoir une bonne connaissance de soi.
Pour le Versus Fighting, un objectif doit être tangible. Vous mettez en place des actions pour y parvenir. Il y a cependant 2 types d’objectifs : objectif de performance et objectif de résultat.
Les objectifs de performance ont pour but votre maîtrise globale, votre attitude, votre exécution – votre école de mindgame (écriture, lecture, poker) ou votre technicité. Bref, ce qui fait de vous un joueur fort et au point. Vous pouvez contrôler ces objectifs, car vos actions et vos efforts amélioreront votre manière de jouer. Vous êtes motivé pour devenir un joueur fort.
Les objectifs de résultat sont par exemple gagner un tournoi, battre un joueur très fort en FT, augmenter son classement en ladder. Ces objectifs ne sont pas entièrement contrôlables, ce qui fait qu’ils sont plus complexes à réaliser. Plusieurs variables ne dépendent pas fondamentalement de vous et la frustration a plus de chances d’arriver à ce moment là. Vous êtes motivé pour gagner des titres et tournois.
Fixez-vous des objectifs clairs, écrivez-les et mettez en place votre plan d’action pour les atteindre. Ces objectifs doivent être spécifiques, mesurables et limités dans le temps.
#6 Discipline
Le génie ne suffit pas. Le savoir-faire ne suffit pas. La réussite de n’importe quel joueur de très haut niveau, c’est 90% de travail, d’entrainement et d’effort, pour 10% de talent pur. Daigo Umehara joue 363 jours par an (anniversaire et Noël il se fait une pause).
L’entrainement, pour atteindre vos objectifs, doit être régulier, quotidien si possible (mieux vaut jouer 15 min par jour que 3h d’un coup par semaine, d’une manière générale). Pensez par ailleurs à avoir un mode de vie « normal » et sain (8h de sommeil par nuit, pas de BK tous les soirs, drogue et alcool à proscrire, activité sportive…). Cependant, il ne faut pas négliger le reste de votre existence au prix de votre training. Les autres loisirs, la famille, les amis et tout autre moment de détente sont aussi très importants.
Jouez. Pour atteindre vos objectifs de jeu, vous devez jouer un certain nombre d’heures, ça ne viendra pas tout seul, c’est un fait. La discipline sera de ne pas flancher et de poursuivre vos efforts. Un « sparring partner » ici est royal, car vous progressez à 2 et vous vous tirez mutuellement vers le haut. Evidemment si vous faites partie d’une association (comme la NTSC, PAR EXEMPLE), la dynamique de groupe fait progresser l’ensemble des joueurs, pour le plaisir de tous.
#7 Shōnen Spirit
L’attitude, la force, le courage, le SSJ2 de Gohan. Tout ça, c’est l’esprit du combattant du manga japonais, que les amateurs de VS Fighting affectionnent. Qu’est-ce que c’est exactement ? C’est l’état d’esprit où rien n’est impossible, où vous pouvez vous transcender à des moments inattendus. Vous êtes littéralement inarrêtable, aussi bien dans le jeu qu’en dehors. Il se peut également qu’en combat (ou sur d’autres jeux, ou si vous êtes musicien lors d’un concert) vous ayez déjà ressenti ce phénomène : Le Flow (ou la Zone).
Wikipédia : En psychologie positive, le flow (littéralement flux en anglais), ou la zone, est un état mental atteint par une personne lorsqu’elle est complètement plongée dans une activité, et se trouve dans un état maximal de concentration, de plein engagement et de satisfaction dans son accomplissement. Fondamentalement, le flow se caractérise par l’absorption totale d’une personne dans son occupation.
Une immersion absolue et totale dans ce que vous faites, sans pour autant en être totalement conscient. Car en effet, une fois que vous avez pris conscience de votre état, vous sortez de la Zone. Voyez la finale de L’EVO 2017 entre Tokido et Punk, sur SFV. Tokido a probablement atteint le Flow à certains moments de la rencontre, tant son jeu était parfait et précis.
Je ne donne pas de solution pour le Shonen Spirit. Cependant, vous pouvez potentiellement aiguiser votre capacité à atteindre le Flow plus « facilement ». En training mode par exemple, répétez un combo difficile sans interruptions, de gauche à droite, sans quitter les yeux de l’écran et de manière hyper concentrée. Peut être cela marchera pour vous. (Personnellement, j’atteins souvent le Flow en jouant à Theathrythm Final Fantasy. Tenter de réussir des triples S sur des musiques en Ultimate demande une très forte concentration).
#8 Passion
Vous aimez le jeu de combat. Je suis convaincu d’une chose : tous les champions de VS Fighting sont passionnés par cette discipline. Je parle évidemment du VS au sens large, tout le monde a le droit de ne pas aimer un jeu plus qu’un autre (suivez mon regard). Mais l’essence de la pratique elle-même est une véritable passion. Le sentiment de progression et de se voir devenir meilleur y est pour beaucoup je pense. Imaginez il y a plus de 20 ans, sur Street Fighter 2. Imaginez le niveau que nous avions. Pas de framedata, pas de combo charaspécifique ou de choses compliquées. Mais juste de l’amour pur et véritable de se fritter avec des copains, puis de montrer qu’on est le plus fort.
Ici aussi, pas de solution. Mais il est très important de redire les choses telles qu’elles sont : il est impossible de devenir très bon à un jeu de combat sans passion pour le jeu de combat. C’est im-po-ss-ible. AIMEZ ce que vous faites, AIMEZ jouer, faites vous PLAISIR et progressez.
#9 Intelligence tactique/de jeu
Savoir « lire » son adversaire, déceler les automatismes, les forces et faiblesses, bloquer son jeu, ceci est l’intelligence tactique. Se concentrer sur ses forces, baser son jeu sur ses points forts est crucial, surtout dans une compétition. Un joueur attentif qui sait quel type de joueur il affronte pourra puiser dans son panel de possibilités pour le mettre à mal. Un joueur ne sachant pas déchopper correctement se prendra des loops de choppe plus facilement, puis un shimmy. Un joueur sautant systématiquement se prendra des anti-air plus facilement. Un joueur qui BOURRE LES BOUTONS à la relevée n’est plus surprenant.
Plus que le matchup entre les différents personnages d’un jeu, je suis partisan du fait de travailler avec autant d’ardeur le matchup des joueurs, des types de joueurs. Quel type de joueur affrontez-vous? Est-il du genre à paniquer quand il est acculé dans le coin? Est-il du genre à s’énerver quand vous lui faites tel ou tel coup? Perd-t-il patience quand le compteur tourne? L’intelligence de jeu, en plus de votre entrainement qui vous donne un large panel de possibilités, vous permettra d’affronter tout type d’adversaire dans les meilleures dispositions.
Dans votre entrainement, intégrez des sessions où vous vous efforcez d’oublier le jeu auquel vous jouez. Concentrez-vous plutôt sur votre adversaire, ce qu’il fait et pourquoi il le fait. Observez-le avec de la patience et tentez de « dialoguer » avec lui. Non seulement vous apprendrez à analyser un être humain, mais également vous découvrirez peut-être une manière de jouer qui est extrêmement fun, car vous jouez réellement contre un humain avant tout.
#10 Le recul
Le jeu vidéo est un loisir. Le VS Fighting est un loisir. Avoir des objectifs, vouloir les réaliser et mettre tout en œuvre pour, c’est génial. Cependant il convient de vous rappeler que ça reste un loisir, une pratique ludique, un PLAISIR. Souvenez-vous bien de ceci. Il faut savoir être sérieux, sans se prendre au sérieux. Alors souriez, rigolez, trollez si ça vous fait plaisir mais restez tout de même dans la légèreté.
Notre communauté est géniale je trouve, car elle reflète assez bien notre monde finalement, avec ses hauts et ses bas, ses gens toxiques comme ses gens attractifs et admirables, ses moments de doutes, de faiblesses, d’exploits, d’allégresse. On y est tous pour quelque chose, chacun à notre échelle.
Si j’avais un message de paix à faire passer, ce serait celui-ci : on est tous comme des gamins devant notre 1er jeu vidéo, avec des copains à la maison. En tournoi, c’est comme ça que je me sens, comme à la maison avec mes potes à doser. Beaucoup me disent que je m’en bats les c…… mais très honnêtement, je préfère cette façon de penser que le « serious business e-sport » d’aujourd’hui, et ceci n’est que MON avis.
Paix et amour, entraînez-vous, et progressons tous ensemble !
See ya !
PS : pour des soucis très pratiques, j’ai rédigé cet article en utilisant uniquement le masculin (joueur, champion….etc). Mais il est évident qu’il n’y a pas QUE des joueurs mais également de nombreuses joueuses et femmes qui se reconnaissent. En gros : j’avais carrément la flemme de mettre des (e) partout ! Merci de ne pas m’en vouloir ^^